Au service des médecins dans l’intérêt des patients

Article 1 - Champ d'application du code

Article 1 (article R.4127-1 du code de la santé publique)


Les dispositions du présent code s'imposent aux médecins inscrits au tableau de l'Ordre, à tout médecin exécutant un acte professionnel dans les conditions prévues à l' article L.4112-7 du code de la santé publique ou par une convention internationale, ainsi qu'aux étudiants en médecine effectuant un remplacement ou assistant un médecin dans le cas prévu à l' article 88 

Conformément à l' article L.4122-1 du code de la santé publique, l'Ordre des médecins est chargé de veiller au respect de ces dispositions.

Les infractions à ces dispositions relèvent de la juridiction disciplinaire de l'Ordre.

 

Parmi les nombreux codes en vigueur dans notre droit - code civil, code pénal, code de la santé publique, code du travail, code des assurances, code de la route, etc., - le code de déontologie médicale occupe une place particulière.

Il a une portée obligatoire et revêt la forme d'un décret en Conseil d’Etat, signé du Premier ministre. Ses prescriptions ne sont pas de simples recommandations, mais des règles de droit qui s'imposent à ceux qui y sont assujettis, auxquelles les tribunaux de droit commun se réfèrent et que les chambres disciplinaires sont tenues de faire respecter.

Mais il constitue aussi un règlement professionnel appelé à régir, non pas l'ensemble des citoyens, mais les seuls membres de la profession médicale (voir note 1).

D'où la nécessité d'en délimiter le champ d'application et d'en fixer le mode de sanction. C'est l'objet de l'article 1er.
 

1 - Qui est assujetti au code de déontologie médicale?

Le code de déontologie médicale s'impose à tous les médecins inscrits au tableau de l'Ordre, qu'ils exercent ou non (voir note 2). Pour exercer la profession de médecin en France (voir note 3), il faut être inscrit à un tableau départemental de l'Ordre. Cette inscription donne le droit d'exercer la profession sur tout le territoire national (voir note 4).

Sont exceptés de cette obligation, les médecins appartenant aux cadres actifs du service de santé des armées (voir note 5) et les médecins qui, ayant la qualité de fonctionnaire de l'Etat ou d'agent titulaire d'une collectivité locale, ne sont pas appelés, dans leurs fonctions, à exercer la médecine. Ces médecins peuvent cependant demander à être inscrits au tableau en vue de l’exercice d’activités médicales, hors exercice de leurs fonctions militaires (voir note 6).

Le code de déontologie médicale s'impose aussi aux médecins, autorisés par le ministre de la santé à exercer sous contrat dans certains établissements de santé et inscrits au tableau de l'Ordre, comme aux médecins ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ou parties à l’Accord sur l’Espace économique européen, effectuant une prestation de service en France (article L.4112-7 du code de la santé publique).

Enfin, le code de déontologie médicale s'impose aux étudiants en médecine effectuant un remplacement et à ceux qui exercent momentanément en qualité d’adjoint lors d'épidémies ou d'afflux de population (article L.4131-2 du code de la santé publique).

Ses prescriptions valent aussi pour les internes ou les résidents auprès d'établissements de santé ou de praticiens enseignants, mais ne leur sont pas opposables. On considère qu'ils exercent sous la responsabilité du médecin responsable de l’unité ou du pôle ou de leur maître de stage et que ceux-ci veillent au respect de la déontologie.

Le code de déontologie n'est pas opposable aux tiers impliqués dans une activité médicale. C'est seulement au médecin qu'on pourra reprocher de se lier à des tiers par une convention ne respectant pas la déontologie, et c'est seulement le médecin qui pourra se voir traduit devant la juridiction ordinale.

En cas de circonstances exceptionnelles, notamment lors de l’intervention en situation de catastrophe, marquée par une inadéquation brutale entre l’ampleur de la demande et les possibilités d’y répondre, le médecin reste soumis aux principes fondamentaux de la déontologie et de l’éthique médicales et doit, en toutes hypothèses, s’efforcer d’en respecter l’esprit.

Lorsqu’il est amené à s’affranchir de dispositions formelles du code de déontologie, il doit le faire de façon proportionnée aux contraintes liées à la situation à laquelle il doit faire face.

Il ne saurait faire l’objet de sanctions disciplinaires en cas d’éventuels manquements relevés dans le cadre de ces circonstances exceptionnelles et dans les conditions sus-rappelées.

 

2 - Comment sont réprimées les infractions à ce code ?

 Ne s'imposant qu'aux seuls médecins et non à l'ensemble de la population, le code de déontologie médicale n'est pas assorti en fin de texte - à la différence de la plupart des autres règlements - de dispositions pénales fixant les peines encourues devant les juridictions de droit commun en cas d'infraction à ses prescriptions.

Ce n'est pas à la justice pénale qu'est confiée la charge de le faire respecter, mais à l'Ordre, et plus particulièrement aux juridictions ordinales.

Ces juridictions, présidées par des membres du corps des conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel,  sont, en première instance, les chambres disciplinaires régionales et en appel, la chambre disciplinaire nationale.

Des sections des assurances sociales, appelées à connaître des plaintes des organismes d’assurance maladie contre des médecins pour des faits commis à l'occasion de soins dispensés aux assurés sociaux, existent à l'échelon régional comme à l'échelon national.

Toutes ces juridictions ont le caractère de juridictions administratives et non pas judiciaires. Les décisions de la chambre disciplinaire nationale et de la section des assurances sociales du Conseil national, peuvent être déférées au Conseil d’Etat par la voie du pourvoi en cassation.

Toute personne, qui s’estime victime, peut porter plainte contre un médecin auprès du conseil départemental de l’Ordre dont relève le médecin. Toutefois, la plainte ne peut pas être transmise à la chambre disciplinaire de première instance sans qu’une conciliation n’ait été organisée (article L. 4123-2 du code de la santé publique). Il y a une exception à la conciliation, admise par la jurisprudence (note [1]7), lorsque la plainte contre un médecin est portée par le conseil départemental et/ou le conseil national de l’Ordre.

La plainte contre un médecin, qui exerce son activité à titre libéral ou salarié, peut être portée, par :

  • le conseil national ou le conseil départemental au tableau duquel est inscrit le médecin, un syndicat médical ou une association de médecins, le ministre de la santé, le préfet du département, le directeur général de l’ARS, le procureur de la République ;
  • un patient, les organismes locaux d'assurance maladie obligatoires, les médecins-conseils chefs ou responsables des organismes de sécurité sociale, les associations de défense des droits des patients, des usagers du système de santé ou des personnes en situation de précarité (article R.4126-1 du code de la santé publique).
     

Lorsque le médecin est chargé d’un service public (médecin hospitalier, médecin expert, médecin agréé…), la chambre disciplinaire ne peut être saisie, à l’occasion des actes commis dans cette fonction, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l’Etat dans le département, le directeur général de l’ARS, le procureur de la République, le Conseil national ou le Conseil départemental au tableau duquel le médecin est inscrit (article L.4124-2, 1er alinéa du code de la santé publique).

Si le médecin exerce une fonction de contrôle, prévue par la loi ou le règlement (par exemple, médecin conseil d’un organisme d’assurance maladie…) il ne peut être traduit devant la chambre disciplinaire, à l’occasion des actes commis dans cette fonction, que par le ministre chargé de la santé, le représentant de l’Etat dans le département ou le Procureur de la République (article L.4124-2, 2ème alinéa du code de la santé publique).

La saisine de la juridiction professionnelle ne fait obstacle à aucune action judiciaire de droit commun. Un médecin peut, pour les mêmes faits ou accusations, être jugé par un tribunal et devant l'Ordre. La juridiction ordinale n’est pas tenue de surseoir à statuer dans l’attente de la décision et n'est liée par les décisions définitives des juridictions pénales qu'en ce qui concerne la matérialité des faits.

Les sanctions qu'elle inflige sont des peines professionnelles (avertissement, blâme, interdiction temporaire d'exercer, radiation du tableau de l'Ordre).

En confiant aux médecins eux-mêmes l'exercice du pouvoir disciplinaire, le législateur a entendu marquer à la fois une exigence et une confiance :

  • une exigence parce que, du fait des sanctions spécifiques qui peuvent les atteindre dans leur exercice professionnel, les médecins supportent des risques que ne connaissent pas la plupart des autres professionnels ;
  • une confiance parce que ce pouvoir de prononcer des sanctions - et parfois de graves sanctions - est confié à des médecins désignés par leurs pairs.
     

Ce pouvoir de juridiction confié à des médecins les engage profondément. C'est sur eux que les pouvoirs publics comptent pour éviter des abus préjudiciables aux patients et à la société ; c'est sur eux, également, que les médecins comptent pour que soit respectée, dans l'exercice d'une responsabilité toute personnelle, leur liberté de décision en présence du patient.
 

 


(1) Article L. 4123-1, alinéa 5 du code de la santé publique : «  En aucun cas, il (l’Ordre) n'a à connaître des actes, des attitudes, des opinions politiques ou religieuses des membres de l'ordre. »

(2) Un médecin, radié du tableau à sa demande, peut être poursuivi par l'Ordre pour des faits antérieurs à la radiation.

(3) On entend généralement par “ exercice de la médecine ”, la pratique d’actes médicaux de soins, de prévention, de contrôle ou d’expertise, effectués après examen de la personne ou sur dossier.

(4) Le médecin qui s'inscrit pour la première fois, ne peut commencer à exercer avant que son inscription soit prononcée. Le médecin qui change de département peut exercer provisoirement en attendant que le "nouveau" conseil départemental ait statué sur son cas (art. L. 4112-5 du code de la santé).

(5) Article L.4112-6 du code de la santé publique. Les médecins militaires sont soumis à des règles de déontologie qui leur sont propres (décret n° 2008-967 du 16 septembre 2008)

(6) CE, 7 octobre 2009, Lewden, n°298522

(7) CE, 23 décembre 2011, n° 344762 : « Considérant qu’eu égard à l'objet de la procédure de conciliation, qui est de permettre aux parties de régler le différend qui les oppose avant qu'il ne soit éventuellement porté devant la juridiction disciplinaire, et à la mission de l'ordre, qui l'exerce à travers ses différents conseils, de veiller au respect de la déontologie médicale, la procédure de conciliation, qui doit en principe être organisée par le conseil départemental lorsqu'une plainte contre un médecin est portée devant lui, est sans objet lorsque la plainte émane d'une ou de plusieurs des instances de l'ordre. »