Au service des médecins dans l’intérêt des patients

Article 33 - Diagnostic

Article 33 (article R.4127-33 du code de la santé publique)

Le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s'aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s'il y a lieu, de concours appropriés.

 

La démarche diagnostique est la première étape de toute prise en charge d'un patient. Certaines constatations initiales, consciencieusement consignées, permettent à elles seules d'affirmer ou d'orienter le diagnostic étiologique. C'est donc un temps important dont la qualité conditionne toute la démarche du médecin et souvent de ceux qui y contribueront.

Depuis l'avènement de la méthode anatomo-clinique (Morgagni, Bichat, Laennec), une "médecine de diagnostic" s'est imposée contre la "médecine des symptômes" qui consistait à indiquer un remède en regard d'un symptôme sans trop savoir ce que l'on soignait. Le diagnostic de Laennec était celui de la lésion. Avec l'évolution scientifique, il s'agit aussi du diagnostic d'une perturbation physio-pathologique ou biologique.

La médecine demande que l'on reconnaisse la nature et l'origine du mal, pour le soigner d'une manière adéquate. Cela est particulièrement souhaitable pour les cas graves, mais, parfois, dans l'immédiat, on ne peut faire que le diagnostic d'un état, ce qui justifie momentanément la mise en œuvre d'un traitement seulement symptomatique. Il en va ainsi notamment en cas de défaillance vitale pour laquelle un traitement d'urgence peut être salvateur ; le diagnostic des lésions ou de l'affection causale est remis à plus tard par nécessité ; l'étape initiale que représente la démarche diagnostique est différée par la hiérarchie des problèmes à résoudre.

Le diagnostic est parfois difficile ; même à l'époque actuelle les médecins les plus expérimentés peuvent être embarrassés. L'hésitation dans le diagnostic, l'absence de diagnostic initial ou l'erreur ne sont pas répréhensibles si l'examen a été bien fait et la réflexion convenable. Le médecin n'est pas non plus répréhensible s'il est obligé de donner, dans l'incertitude où il se trouve, une thérapeutique d'attente.

Ce qui constitue une faute c'est de ne pas chercher à faire le diagnostic, avec tout le soin nécessaire, de rester dans le vague en confiant au hasard les suites, de prescrire un traitement standard sans discrimination, de ne pas adapter un protocole diagnostique ou thérapeutique aux circonstances et à la situation personnelle du patient à qui on l'applique. Un interrogatoire minutieux, comme la prise en compte des constatations antérieures, peut être d'un secours important au cours de cette étape initiale de la prise en charge du patient.

Le recours aux investigations et examens complémentaires de toute nature ne doit pas être retardé dans la mesure où ils sont nécessaires et logiquement orientés. Ceux-ci ne peuvent pas être codifiés. Cet article recommande bien : "les méthodes scientifiques les mieux adaptées" selon les cas. Les examens inutiles doivent être évités aux patients, de même que les examens dangereux ou pénibles s'ils ne sont pas indispensables au diagnostic. Il en est de même pour les examens redondants. Un "acharnement diagnostique" est louable en principe, mais déraisonnable s'il a pour mobile la curiosité scientifique, ou si le patient ne bénéficie pas des conséquences auxquelles il conduit, notamment si l'aboutissement est seulement un traitement palliatif ne modifiant pas le pronostic.

Tout examen entraînant une sujétion, des contraintes ou des désagréments pour le patient, son opportunité doit être discutée préalablement à la décision, en évaluant bien le bénéfice qu'on peut en attendre au regard des contraintes qu'on impose, de ce fait, au patient.

Si le médecin est embarrassé pour établir un diagnostic, il doit faire appel à un consultant, à un spécialiste, ou prescrire la mise en observation du patient. C'est une règle de déontologie qui, dès l'Antiquité, était suggérée au médecin. Cet appel implique que le médecin choisisse soigneusement, et en vertu de leurs seules compétences, les confrères auxquels il présentera ou adressera son patient, avec l'accord de celui-ci, et cela à l'exclusion de toute considération étrangère à l'intérêt du patient dans la situation donnée.

Les technologies de l’information et de la communication permettent de faire appel à un consultant, plus ou moins éloigné, dont la compétence est sollicitée dans une situation particulière. Il ne s'agit pas seulement de l'envoi de données à distance, pour interprétation par des experts dans le cadre du télédiagnostic ou d'aide à la décision, mais aussi des possibilités de télé-consultation et de télé-assistance offertes par la télémédecine, dès lors que le patient, pour des raisons d'éloignement ou d'isolement, ne peut bénéficier de l'intervention d'un médecin. Cette prise en charge médicale doit s’inscrire dans le cadre des règles déontologiques (voir note [1]).

Un tiers non médecin peut être l'intermédiaire obligé du praticien, tant pour recueillir les informations cliniques nécessaires au bilan de la situation que pour exécuter des gestes qui ont pour objectif d'être vitaux dans l'immédiat ou d'éviter la survenue de complications fatales. Le médecin consultant à distance doit faire preuve de perspicacité, mettre en œuvre toute son attention et les qualités d'écoute nécessaires pour rassurer l'environnement du malade ou du blessé. Il importe qu'il soit particulièrement clair et précis dans les questions qu'il pose autant que dans les actes dont il demande l'exécution ; il doit s'assurer qu'il a été bien compris par le patient et l'entourage pour que le patient tire tout le bénéfice attendu de son intervention.


([1]) Télémédecine – Les préconisations du Conseil national de l’Ordre des médecins – janvier 2009 –
J. LUCAS, « Déontologie médicale sur le web : Livre blanc du CNOM », décembre 2011, www.conseil-national.medecin.fr