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Article 53 - Honoraires

Article 53 (article R.4127-53 du code de la santé publique)
 

I.  Les honoraires du médecin doivent être déterminés avec tact et mesure, en tenant compte de la réglementation en vigueur, des actes dispensés ou de circonstances particulières.
Ils ne peuvent être réclamés qu'à l'occasion d'actes réellement effectués même s’ils relèvent de la télémédecine.
Le simple avis ou conseil dispensé à un patient par téléphone ou par correspondance ne peut donner lieu à aucun honoraire.

II. Le médecin se conforme aux dispositions des articles L. 1111-3-2 et L. 1111-3-3 en ce qui concerne l'information du patient sur les frais afférents à ses prestations et aux conditions de prise en charge et de dispense d'avance de ces frais. Il veille à l'information préalable du patient sur le montant des honoraires.
Le médecin qui présente son activité au public, notamment sur un site internet, doit y inclure une information sur les honoraires pratiqués, les modes de paiement acceptés et les obligations posées par la loi pour permettre l'accès de toute personne à la prévention ou aux soins sans discrimination. L'information doit être claire, honnête, précise et non comparative.
Le médecin doit répondre à toute demande d'information ou d'explications sur ses honoraires ou le coût d'un traitement.

III.  Aucun mode particulier de règlement ne peut être imposé au patient. « Le médecin ne peut refuser un acquit des sommes perçues.

1.    La fixation des honoraires (article 4127-53 alinéa 1)

1.1.    Le cadre général

La réglementation des honoraires est complexe. On peut retenir, à titre principal, deux éléments.
Deux grandes situations sont à distinguer :

  1. celle où le médecin est tenu de respecter des honoraires dont le montant est fixé ;
    et,
  2.  celle où le médecin fixe librement ses honoraires (on parle d’honoraires libres).

Le médecin qui bénéficie de la liberté de fixer ses honoraires est néanmoins tenu, en toutes circonstances, au respect du principe du tact et mesure.

S’agissant des honoraires tarifés, ils sont fixés par la convention nationale des médecins libéraux, et apparaissent en annexe de ladite convention.

Ce n’est que pour mémoire qu’il peut être rappelé qu’il existe d’autres types de tarification, par exemple, pour les actes médicaux prévus par le code de procédure pénale.

Les tarifs fixés par la convention s’imposent aux médecins conventionnés dits de secteur 1 pour l’ensemble de leurs consultations et actes techniques. Mais ils peuvent également s’imposer, dans certains cas, aux médecins conventionnés dits de secteur 2, bien que ces médecins aient le droit à des dépassements d’honoraires, en application de l’article L 162-5 du code de la sécurité sociale. Ces médecins sont en effet tenus, dans certaines hypothèses, d’appliquer les tarifs prévus par la convention. Ainsi lorsqu’ils prennent en charge les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire.

A l’inverse, les médecins qui exercent en secteur 1 et sont tenus, à ce titre, de respecter les tarifs conventionnels, retrouvent la liberté de fixer leurs honoraires dans quelques hypothèses, ainsi pour des activités pour lesquelles aucun tarif conventionnel n’a été fixé, ou en cas d’exigences particulières du patient non liées à des raisons médicales.
 

1.2.    Le respect du tact et de la mesure
 

1.2.1.    Le principe du tact et mesure

Lorsqu’un médecin peut fixer librement ses honoraires il doit veiller à ce que cette liberté ne se fasse pas au détriment de l’accès aux soins. Dans la détermination des honoraires, le code de déontologie renvoie le médecin au tact et mesure et à des circonstances particulières.

Le médecin doit être à même d’expliquer au patient le montant de ses honoraires et en cas de de procédure disciplinaire d’en justifier. Il pourra notamment invoquer le temps qu’il a consacré au patient, la complexité de l’acte voire sa propre notoriété.

Celle-ci ne peut pas être auto-proclamée et ne peut résulter du seul fait qu’il remplit les conditions pour bénéficier du secteur 2 en raison de ses titres hospitaliers. Elle doit être documentée, notamment par le fait que son expertise est recherchée par ses confrères, ou encore par ses travaux de recherche et titres universitaires.

La détermination du tact et mesure n’est pas une opération arithmétique et ne peut se résumer à un coefficient multiplicateur du tarif conventionnel. L’Ordre des médecins doit s’assurer du comportement déontologique du praticien laissant aux partenaires conventionnels la discussion du juste montant des tarifs conventionnels.

Le montant des honoraires pratiqués par un médecin ne peut pas être uniforme et doit être individualisé en fonction des personnes et des difficultés de la prise en charge.
L’information préalable donnée au patient ne peut constituer à elle seule la justification du montant des honoraires.

Tous les médecins doivent en toutes circonstances respecter le tact et mesure et la juridiction professionnelle ordinale a pu sanctionner des manquements en dehors d’une pratique de soins (exemple : honoraires réclamés en contrepartie d’une aide à la constitution d’un dossier de maladie professionnelle).
 

1.2.2    La sanction du non-respect du tact et mesure

Traditionnellement, la sanction du non-respect du tact et mesure relève du juge disciplinaire ordinal. Ce dernier peut être saisi de plaintes pour manquement à cette règle dans les mêmes conditions que pour tout manquement déontologique. Il appartient notamment en ce sens à chaque conseil départemental de l’ordre, gardien à son niveau du respect de la déontologie médicale, d’engager des poursuites disciplinaires dès qu’il a connaissance de faits de nature à faire douter du respect du tact et de la mesure. Les sanctions susceptibles d’être prononcées sont les sanctions disciplinaires habituelles, à l’exclusion de toute sanction financière.

Mais un second dispositif de sanction vient d’être mis en place par voie règlementaire (décret n° 2020-1215 du 2 octobre 2020, qui modifie pour ce faire le code de la sécurité sociale). L’article R147-2 de ce code, issu de ce décret donne au directeur de la CPAM le pouvoir de prononcer des pénalités financières contre un médecin en cas de dépassements d'honoraires abusifs, contraires au principe du tact et de la mesure. Le directeur de la CPAM est conduit, à ce titre, à appliquer des critères d’appréciation de ce qu’il faut entendre par tact et mesure, au sens de la règlementation de la sécurité sociale.

Selon l’article R 147-13 du code de la sécurité sociale issu du décret du 2 octobre précité « Le respect du tact et de la mesure s'apprécie notamment, dans le cadre du présent article, au regard de la prise en compte dans la fixation des honoraires de la complexité de l'acte réalisé et du temps consacré, du service rendu au patient, de la notoriété du praticien, du pourcentage d'actes avec dépassement ou du montant moyen de dépassement pratiqués, pour une activité comparable, par les professionnels de santé exerçant dans le même département ou dans la même région administrative »;

On remarque particulièrement, parmi ces critères non limitatifs, la présence de deux critères de nature statistique : le pourcentage d'actes avec dépassement et le montant moyen de dépassements pratiqués, pour une activité comparable, par les professionnels de santé exerçant dans le même département ou dans la même région. Cela fait ressortir la grande différence de contrôle et d’appréciation du tact et mesure, entre instances ordinales et assurance maladie. Les critères ordinaux renvoient à un comportement individuel vis-à-vis d’un patient dans une situation donnée alors que les critères du code de la sécurité sociale associent comportement individuel et comportement général.
 

2.    Les conditions générales de perception d’honoraires

2.1.    Le paiement d’une prestation de soins effectivement réalisée (article R 4127-53 alinéa 2)

Un médecin ne peut demander le paiement d’actes qu’il n’a pas faits, en présentiel ou en télémédecine. Il commettrait une infraction déontologique voire une fraude pénale, notamment si l’acte est pris en charge par un tiers (assurance maladie obligatoire ou complémentaire).

2.2.    Les prestations facturables

Dans certaines situations, la question peut se poser de la facturation par le médecin conventionné de prestations qui ne sont pas incluses dans le tarif de l’acte.

L’article L1111-3-4 du code de la santé publique, issu de la loi 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, apporte une réponse à cette question en édictant la règle suivant laquelle « les professionnels de santé conventionnés ne peuvent facturer que les frais correspondants à la prestation de soins assurée et ne peuvent exiger le paiement d'une prestation qui ne correspond pas directement à une prestation de soins ».

La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) précise :« Ces professionnels ne peuvent exiger des patients que le paiement d’une somme correspondant à une prestation de soin. Lorsque le professionnel propose d’autres prestations au patient, il doit en afficher la liste et le prix de chacune d’elles. L’affichage ne doit pas faire douter le patient du caractère facultatif de la prestation. Par exemple, le radiologue peut proposer à titre payant une prestation d’archivage numérique mais ne saurait l’imposer ». Ces informations, consultables sur le site economie.gouv.fr, sont extraites d’une fiche pratique de février 2021 intitulée : « facturation des professionnels et établissements de santé : qu’est ce qui peut vous être facturé ».

2.3.    L’interdiction de facturer le simple avis ou le conseil par téléphone (article R 4127-53 alinéa 3)
Cette disposition de l’article R 4127 53 du code de la santé publique n’a pas été modifiée en 2012 lorsque le CNOM a fait introduire la télémédecine parmi les actes pouvant donner lieu à honoraires (décret n° 2012-694 du 7 mai 2012 portant modification du code de déontologie médicale). On observera que pendant la pandémie de Covid-19, la réglementation a permis la facturation et la prise en charge de téléconsultations téléphoniques. Par ailleurs, le développement des messageries sécurisées entre médecins et patients pourrait donner une nouvelle actualité à cette question.

En tout état de cause, le simple avis ou le conseil engagent pleinement la responsabilité du médecin qui le donne.

2.4.    L’interdiction d’imposer un moyen de paiement (article R 4127-53 alinéa 7)
L’interdiction d’imposer un mode de règlement a eu initialement pour objet de lutter contre les pratiques de professionnels exigeant un paiement en espèces. Cette situation est aujourd’hui devenue exceptionnelle et le développement de la téléconsultation impose d’apporter des nuances à la règle édictée dès lors que la consultation à distance est bien évidemment associée à un paiement à distance.

2.5.    Télémédecine et paiement à distance
La télémédecine présente une spécificité liée au paiement à distance. L’Agence du Numérique en Santé (ANS) a élaboré un référentiel fonctionnel socle pour les logiciels de télémédecine où il est précisé, s’agissant de la solution de paiement que « Le système devrait intégrer une solution de paiement conforme PCI DSS qui permet au patient de régler sa téléconsultation en ligne (en totalité ou sur le montant restant à sa charge). Cette solution de paiement peut en outre sécuriser le professionnel en collectant les coordonnées bancaires en amont de la téléconsultation et en débitant automatiquement le patient à l'issue de la téléconsultation ».
Ainsi il apparaît bien que la prise d’empreinte bancaire ou la pré-autorisation de paiement est conforme aux règles déontologiques à deux conditions : le patient a été préalablement informé par le médecin, directement ou via le site utilisé, que le paiement ne sera réalisé qu’après la téléconsultation et l’acte doit avoir été réellement effectué.

2.6.    L’acquit des honoraires (article R 4127-53 alinéa 7)
Le développement de la télétransmission des feuilles des soins électroniques a constitué une facilité pour les médecins et pour les patients. Si, en vertu de l’article R 161-49 du code de la sécurité sociale, la feuille de soins tient lieu de facturation et donc d’acquit des sommes perçues, le patient peut cependant demander au médecin qui l’a établi, une copie de la feuille de soins électronique conformément au présent article R 4127-53 du code de la santé publique et aussi, en application de l’article R 161-47 du code de la sécurité sociale.

Toujours en vertu de l’article R 161-49 du code de la sécurité sociale, la quittance n’est obligatoire qu’en cas de paiement en espèces.
 

3.    L’information préalable des patients (article R 4127-53 alinéa 4)

3.1.    La double nature de l’obligation d’information

Les obligations des médecins en matière d’information préalable sur les honoraires sont des obligations déontologiques. C’était déjà la position de la Chambre disciplinaire nationale. Le non-respect des obligations légales d’information est aussi une infraction de caractère économique et peut donner lieu à une amende administrative de 3 000 € maximum pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale, prononcée par l'autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation.

Conformément à l’article L. 1111-3-3 du code de la santé publique, un arrêté du 30 mai 2018 relatif à l'information des personnes destinataires d'activités de prévention, de diagnostic et/ou de soins précise les obligations des professionnels de santé et notamment celle des médecins.

3.2.    Les supports de l’information

Cette information peut se faire sur plusieurs supports :

3.2.1.    La plaque professionnelle avec l’indication du conventionnement et, le cas échéant, du secteur conventionnel d'appartenance

3.2.2.    Les plateformes de prise de rendez-vous médical en ligne

Elles doivent comporter, en vertu de l’arrêté précité, les mêmes informations que les plaques.
Dès lors que ces plateformes sont des sites sur lesquels le médecin présente son activité au public, même sommairement, elles doivent également donner une information sur les honoraires pratiqués, les modes de paiement acceptés et les obligations posées par la loi pour permettre l’accès de toute personne à la prévention ou aux soins sans discrimination (cf. point 4 L’information préalable du public ).

3.2.3.    L’affichage

Il doit être fait de façon lisible et visible sur un même support dans le lieu d'attente du patient ainsi que dans le lieu d'encaissement des frais.

Il doit comporter les mêmes informations que la plaque qui sont complétées par les informations suivantes : le prix des consultations effectivement pratiquées (selon les cas, consultation, consultation de référence, coordonnée, complexe, très complexe, visite à domicile et majoration de nuit, majoration de dimanche, majorations pratiquées dans le cadre de la permanence des soins) et au moins cinq des prestations les plus couramment pratiquées.

L’arrêté du 30 mai 2018 permet que les montants d'honoraires soient indiqués sous forme de fourchettes, sous réserve que les critères de détermination de ces honoraires soient expressément mentionnés. Pour le Conseil national, ces critères peuvent renvoyer aux critères ordinaux du tact et mesure.

L’affichage varie selon que le médecin :

  •  pratique des honoraires conformes aux tarifs fixés par la convention nationale des médecins libéraux ;
  • pratique des dépassements d'honoraires conformément à la convention nationale des médecins libéraux. L’interdiction des dépassements d’honoraires aux bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (exemples : CMU et ACS) devra y figurer ;
  • est non conventionné.

Le Conseil national met à disposition des praticiens différents modèles d’affiches.


3.2.4.    La note d’information préalable

Les médecins doivent délivrer une information écrite préalable comprenant la description des actes et prestations, le montant des honoraires fixés ainsi que, le cas échéant, le montant pris en charge par la sécurité sociale, dès lors que les dépassements d'honoraires des actes et prestations facturés atteignent 70 euros.

3.2.5.    L’Information préalable et téléconsultation

Préalablement à la réalisation d'une pratique médicale à distance, les médecins informent par tout moyen le patient sur les frais auxquels celui-ci pourrait être exposé à l'occasion de la prestation de soins rendue et, le cas échéant, sur les conditions de sa prise en charge et de dispense d'avance de frais.

3.2.6.    L’information personnalisée (article R 4127-53 alinéa 6)

Toutes ces obligations portant sur les supports à utiliser et leur contenu n’exonèrent pas le médecin de son devoir de répondre à toute demande d'information préalable et d’explications du patient sur ses honoraires ou le coût d'un traitement. Ces explications contribueront d’ailleurs à lever les incompréhensions que la complexité de la réglementation des honoraires est susceptible de générer.
 

4.    L’information préalable du public (article R 4127-53 alinéa 5)

Cette disposition, introduite par le décret n°2020-1662 du 22 décembre 2020, constitue une novation majeure.

Désormais un médecin qui présente son activité au public contrevient à la déontologie s’il ne donne pas sur le même support des informations sur ses honoraires et ses obligations en matière de tiers payant et d’application des tarifs conventionnels vis-à-vis des patients bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (CSS).

Il doit également indiquer, dans cette information au public, les modes de paiement qu’il accepte. C’est une autre nouveauté car jusqu’à présent sa seule obligation consistait à ne pas imposer un mode de règlement en particulier.

L’information doit être claire, honnête, précise et non comparative. Le contenu de cette information relève de la responsabilité du médecin qui s’expose à des poursuites disciplinaires s’il ne respecte pas les principes d’une communication déontologique.

A ce titre, le médecin doit donner une information datée et actualisée sur ses pratiques tarifaires. Il précise, pour chacun de ses actes, si les honoraires sont ou non pris en charge par l’assurance maladie obligatoire et dans quelles proportions ; il ne lui appartient pas de donner d’informations sur la prise en charge par les organismes d’assurance maladie complémentaire (assureurs complémentaires, mutuelles, etc) dès lors qu’il n’en a pas la maîtrise.

Il doit décrire ses prestations en termes simples et compréhensibles par tous les publics.

L’information fournie correspond aux consultations et actes habituellement dispensés par le médecin et ne peut mentionner le prix d’actes qu’il ne pratique pas.

Dès lors que le prix indiqué est susceptible d’être majoré pour des circonstances particulières, le médecin doit être particulièrement clair sur ces circonstances et les limites de ces majorations.

Aucune comparaison avec les pratiques tarifaires d’autres praticiens, identifiés ou non, n’est possible.