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Article 83 - Rédaction d'un contrat

Article 83 (article R.4127-83 du code de la santé publique)

 

I - Conformément à l'article L.4113-9, l'exercice habituel de la médecine, sous quelque forme que ce soit, au sein d'une entreprise, d'une collectivité ou d'une institution ressortissant au droit privé doit, dans tous les cas, faire l'objet d'un contrat écrit.

Ce contrat définit les obligations respectives des parties et doit préciser les moyens permettant aux médecins de respecter les dispositions du présent code.

Tout projet de contrat peut être communiqué au conseil départemental de l'ordre, qui doit faire connaître ses observations dans le délai d'un mois.

Toute convention ou renouvellement de convention avec un des organismes prévus au premier alinéa, en vue de l'exercice de la médecine, doit être communiqué au conseil départemental intéressé, de même que les avenants et règlements intérieurs lorsque le contrat y fait référence. Celui-ci vérifie sa conformité avec les prescriptions du présent code ainsi que, s'il en existe, avec les clauses essentielles des contrats-types établis soit par un accord entre le conseil national et les collectivités ou institutions intéressées, soit conformément aux dispositions législatives ou réglementaires.

Le médecin doit signer et remettre au conseil départemental une déclaration aux termes de laquelle il affirmera sur l'honneur qu'il n'a passé aucune contre-lettre ou avenant relatifs au contrat soumis à l'examen du conseil.
 

II- Un médecin ne peut accepter un contrat qui comporte une clause portant atteinte à son indépendance professionnelle ou à la qualité des soins, notamment si cette clause fait dépendre sa rémunération ou la durée de son engagement de critères de rendement.

  1. Commentaires propres à l’article 83

L'article 83 a trait aux conventions qui lient les médecins à des entreprises, collectivités ou institutions ressortissant au droit privé.

Son champ d'application est donc très large et comprend notamment : cliniques privées à but lucratif, établissements de santé privés d’intérêt collectif, mutuelles, compagnies d’assurances, institutions médico-sociales exerçant sous forme associative, associations loi 1901,  caisses de sécurité sociale à l'exception des caisses nationales qui ont le statut d'établissement public, les sociétés nationales et entreprises publiques non érigées en établissements publics…

Tous ces contrats doivent obligatoirement être passés par écrit.

Leur contenu doit être suffisamment substantiel. Ils doivent définir les droits et obligations réciproques des parties et préciser les moyens mis en oeuvre pour assurer le respect des règles de déontologie, notamment en ce qui concerne l'indépendance des médecins et le secret professionnel.

Il ne suffit donc pas de stipuler que le médecin exercera ses fonctions conformément au code de déontologie et que les parties prendront toutes mesures utiles afin que soient assurés le secret médical et l'indépendance technique du praticien. Il faut aussi préciser la nature des mesures ainsi envisagées et le contenu des engagements pris par les parties (voir note [1]).

Il est précisé en outre, que cette obligation de communication porte non seulement sur le contrat mais aussi sur les avenants et sur les règlements intérieurs auxquels il est fait référence. Il est rappelé aussi que les médecins doivent, lors de la communication de leur contrat, déclarer sur l'honneur qu'ils n'ont pas passé à leur propos de contre-lettre.

Pour tous ces contrats le code de déontologie rappelle les règles que pose l'article L.4113-9 du code de la santé publique et notamment l'obligation d'une communication à l'Ordre, avec la possibilité, particulièrement recommandable, d'une présentation de ce contrat à l'état de projet, ce qui a l'avantage de permettre au médecin concerné de tenir compte, avant de signer, des observations ordinales.

Cette communication doit être faite au conseil départemental au tableau duquel est inscrit ou demande à s'inscrire le médecin signataire. C'est à ce conseil qu'il appartient d'étudier le contrat, avenant ou projet qui lui est soumis, de procéder aux vérifications portant, comme il a été indiqué ci-dessus, sur la conformité déontologique de leurs stipulations, leur validité juridique et même leur opportunité au regard du bon exercice de la profession, enfin de formuler les observations qui découlent de cet examen et qui peuvent aller jusqu'à l'émission d'un avis partiellement ou entièrement défavorable.

Dans l'accomplissement  de cette tâche, qui  peut se révéler  très difficile  - tant sont diverses les situations particulières et tant sont grandes les ressources imaginatives des médecins et surtout de leurs conseils juridiques - les conseils départementaux peuvent trouver une aide dans la consultation du Conseil national en soumettant à sa commission des contrats les problèmes qu’ils rencontrent. Mais l'avis du Conseil national ne se substitue pas à celui du conseil départemental qui en est le seul destinataire et qui demeure le seul interlocuteur du médecin qui l'a saisi.

L'article 83 rappelle enfin que la mission de contrôle impartie au conseil départemental porte essentiellement sur la conformité des articles des contrats qui lui sont soumis aux principes formulés dans le code de déontologie, en ajoutant, ce que la loi ne disait pas, que cette conformité doit être vérifiée également par rapport, s'il en existe, aux clauses essentielles des contrats-types établis soit par un accord entre le conseil national et les collectivités ou institutions intéressées, soit conformément aux dispositions législatives ou réglementaires.

Ces contrats-types sont au départ des modèles de contrats élaborés par les instances de l'Ordre en accord avec l'établissement ou l'institution concerné, dans le strict respect des règles de la déontologie. Ils sont proposés et non imposés aux médecins désireux de contracter et il leur est recommandé de s'en inspirer. La question des clauses essentielles est abordée dans les commentaires de l’article 91.

  1. Commentaires communs à l’ensemble des contrats (articles 83, 84 et 91 du code de déontologie médicale)

L'exercice de la profession médicale conduit souvent les médecins à passer des contrats, soit avec d'autres médecins, soit avec des tiers, contrats d'exercice en commun, en association ou en société - contrat de location de locaux professionnels ou de matériels - contrats d'exercice en clinique - contrat d'engagement dans des établissements publics ou privés - contrats de remplacement - contrats de cession de cabinet, et beaucoup d'autres...

En application du principe de la liberté des conventions, ces contrats sont conclus librement sans besoin d'autorisation et, sous réserve de ne pas contrevenir à l'ordre public, leur contenu est librement déterminé par les parties signataires qui sont tenues d'en respecter les stipulations.

Toutefois l'Ordre qui a pour mission aux termes de l'article L.4121-2 du code de la santé publique de "veiller à l'observation par tous les médecins de leurs devoirs professionnels ainsi que des règles édictées par le code de déontologie", ne peut se dispenser d'exercer sur tous ces contrats non seulement un droit de regard mais aussi un certain contrôle.

C'est ce qu'a prévu le législateur en instituant aux articles L.4113-9 à L.4113-12 du code de la santé publique, un régime de communication des contrats à l'Ordre avec possibilité de certaines interventions de sa part, en vue de concilier au mieux le respect de la liberté contractuelle avec les impératifs d'un contrôle déontologique.

L'article L.4113-9 a donc d'abord spécifié que tous les contrats et avenants intervenant à l'occasion de l'exercice de la profession devaient nécessairement être passés par écrit, puis posé le principe de leur communication obligatoire aux conseils départementaux de l'Ordre. Il a enfin prévu des sanctions à l'encontre des médecins qui s'en abstiendraient (refus d'inscription ou poursuites disciplinaires) ainsi que des tiers qui s'y opposeraient (amende pénale).

Les contrats et avenants doivent être communiqués lors de la demande d'inscription au tableau (contrat à annexer à la demande) et à tout moment en cours d'exercice, dans le mois suivant leur conclusion.

Les médecins ont également la possibilité d'anticiper cette communication en soumettant à l'avis du conseil départemental un contrat encore à l'état de projet (article L.4113-12).

Les vérifications à opérer portent, sans que soit perdu de vue le principe fondamental de la liberté contractuelle qui fait la loi des parties, sur la conformité déontologique des stipulations du contrat en cause, au regard notamment du respect de la liberté d'exercice et de l'indépendance professionnelle ainsi que des principes du libre choix, de la liberté d'installation et de prescription, du secret professionnel, sur sa validité juridique (absence de clauses contraires à l'ordre public et à la loi), sur sa cohérence interne (clauses obscures, contradictoires, mal rédigées) et enfin sur son opportunité au regard du bon exercice de la profession (clauses léonines ou potentiellement conflictuelles).

L'examen auquel doit procéder le conseil départemental est enfermé dans des délais : un mois s'il s'agit d'un projet (article L.4113-12), six mois pour les contrats déjà signés (article L.4113-10).

L'expiration de ces délais a pour seul effet d'interdire la mise en œuvre de poursuites disciplinaires en cas de clauses antidéontologiques. Elle ne dessaisit nullement le conseil de ses pouvoirs de mise en garde ou d'injonction et ne vaut pas approbation tacite du contrat en cause.

En règle générale l'Ordre n'a aucun pouvoir d'approbation. Le contrat est valable de par la signature des parties, indépendamment des observations qu'il peut être amené à formuler et seule l'autorité judiciaire peut en prononcer l'annulation.

Les observations du conseil départemental ne constituent qu'un avis qui toutefois, par exception aux principes généraux du contentieux administratif, est regardé, lorsqu'il est négatif, comme faisant grief et pouvant faire l'objet d'un recours devant le Conseil national, puis d'un pourvoi devant le Conseil d'Etat (voir note [2]).

On doit relever que la loi 2009-879 du 21 juillet 2009 a renforcé les pouvoirs de l’Ordre en introduisant les dispositions suivantes à l’article L 4113-9 du code de la santé publique : « Les dispositions contractuelles incompatibles avec les règles de la profession ou susceptibles de priver les contractants de leur indépendance professionnelle les rendent passibles de sanctions disciplinaires…»

Dans trois cas particuliers le conseil de l'Ordre dispose de pouvoirs supplémentaires :

  1. lorsque le contrat accompagne une demande d'inscription au tableau, la présence de clauses antidéontologiques peut justifier un refus d'inscription ;

  2. il en va de même s'il s'agit d'un contrat instituant une société civile professionnelle (SCP) ou une société d'exercice libéral (SEL) car la reconnaissance par le conseil de la régularité juridique et déontologique des statuts est une condition à l'inscription de ces sociétés ;

  3. si les parties ont elles-mêmes subordonné l'entrée en vigueur du contrat à l'approbation de l'Ordre.
     

C'est dans le cadre de ce régime général défini par la loi et applicable à tous les contrats ayant pour objet l'exercice de la profession médicale que s'insèrent trois des articles du code de déontologie, respectivement consacrés à certains d'entre eux parmi les plus usuels, qui viennent sur le plan réglementaire compléter et adapter à leurs cas particuliers les règles du code de la santé publique :

  • l'article 83 concerne les contrats intervenant entre médecins et entreprises ou établissements de droit privé ;
  • l'article 84 a trait aux contrats conclus entre médecins et administrations publiques ;
  • l'article 91 régit les contrats passés par les médecins entre eux ou avec d'autres professionnels de la santé.

([1]) Conseil d’Etat, 9 juin 1967, Laudet, n°68156, Recueil p.243

([2]) Conseil d’Etat, 25 octobre 1974, Valton et Allemandou, non publié