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Article 19 - Commerce - interdiction

Article 19 (article R.4127-19 du code de la santé publique)

La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce.

1.  Le principe selon lequel la médecine ne saurait être pratiquée comme un commerce constitue un principe essentiel de l’exercice de la médecine. La santé n’est pas un bien marchand. L’acte médical ne peut être considéré comme une denrée, une marchandise échangée contre une contrepartie quelle qu’elle soit. Le médecin ne vend pas des ordonnances ou des soins ou des certificats. La médecine est un service. Le contrat moral de soins, qui est à la base de la responsabilité médicale n’est pas une convention commerciale, ni un marché. C’est un contrat tacite, par lequel le médecin s’engage à donner des soins adéquats, qui ne sont pas définis par avance et qui diffèrent selon les circonstances.

2. Ce principe ainsi défini est à l’origine de plusieurs règles plus formalisées et très précises inscrites dans le code de déontologie, qui viennent en expliciter la portée, notamment sous forme d’interdictions ou de prescriptions :
  • interdiction du partage clandestin d'honoraires (articles 22, 94) ;
  • interdiction du compérage (article 23) ;
  • interdiction des ristournes, commissions, avantages (article 24) ;
  • interdiction de consulter dans des locaux commerciaux (article 25) ;
  • interdiction de détournement de patientèle (article 57) ;
  • interdiction d’honoraires pour des actes non réellement effectués et d’abaissement volontaire d’honoraires dans un but de concurrence (articles 55 et 67) ;
  • prescription de détermination des honoraires avec tact et mesure et dans la transparence (articles 53 et 54).

3.  Le principe selon lequel la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce est également à l’origine de nombreuses obligations, tant générales que pratiques, qui s’imposent aux médecins dans leur exercice et l’organisation de leur activité :
 
3.1.    Le médecin doit s’interdire tout comportement qualifiable de mercantile, animé par la seule recherche du profit

Un tel comportement est caractérisé dès lors que le médecin fait primer son intérêt au détriment de celui du patient, ou que la recherche de cet intérêt compromet la qualité ou la sécurité des soins.

La juridiction disciplinaire a sanctionné les pratiques mercantiles suivantes :
  • la publication par un médecin ophtalmologiste sur le site internet du centre esthétique où il exerçait et dont il était actionnaire majoritaire d’offres promotionnelles sous le titre « Cadeau de Noël (…) Offrez-vous une nouvelle vue pour Noël (…) Visite préopératoire gratuite ». (CDN 16/02/2012, no 11060) ;
  • la collaboration d’un médecin avec une société pour qu’elle fasse figurer sur son site internet une offre commerciale permettant aux bénéficiaires d’obtenir des ristournes en argent de certains actes, avec un lien renvoyant sur le site internet du professionnel (CDN 17/09/2019 n°13395) ;
  •  la participation d'un médecin à un site internet dispensant des conseils nutritionnels personnalisés, sous sa supervision et moyennant la souscription d'abonnements payants, avec un intéressement financier aux recettes des services proposés par ce site (CDN 12/11/2015 n°12336) ;
  • la confusion entretenue auprès des patients par un médecin entre son activité libérale de médecin et l’activité commerciale de la société X, dont il était l’un des principaux actionnaires, cette confusion faisant que les deux activités tiraient profit l’une de l’autre (CDN 13/11/2017 n°13101) ;
  •  la réclamation d’une avance sur honoraires ou d’une avance forfaitaire pour des séances d’épilations laser (CDN 10/12/2010, no 10605).
3.2.    Le médecin doit s’interdire de retenir dans la dénomination de son cabinet médical, de sa société d’exercice ou de son site internet, un nom qui les fasse assimiler à une activité de nature commerciale.
 
Un cabinet médical ou une société d’exercice ne constituent ni des commerces, ni des lieux d’exercice d’un commerce. Le médecin doit dès lors s’interdire, lorsqu’il les dénomme, de retenir un nom qui prête le flanc à une assimilation à une activité commerciale, ou comporte un aspect de pratique commerciale. Ainsi d’une dénomination « centre ou institut », accolée à une SEL unipersonnelle, qui laisse entendre à une mission dépassant les capacités d’une seule personne, ou d’une dénomination géographique sous-entendant un monopole dans la zone considérée.
 
3.3    Le médecin sollicité de participer à une plateforme de téléconsultation se doit d’être très vigilant. En effet, certaines de ces plateformes se posent purement et simplement, au travers de publicités commerciales, en offreurs de soins en mesure de répondre à tous les besoins de la population où qu’ils se font jour, en dehors de tout parcours de soins, et de toute réponse coordonnée aux besoins de la population à l’échelon d’un territoire.
 
La téléconsultation peut alors facilement dériver vers un bien de consommation mis en vente sur une plateforme commerciale.

Le médecin qui entend s’engager auprès de plateformes de téléconsultation est dès lors vivement incité à obtenir, avec le concours ordinal, des garanties de ces plateformes sur le cadre déontologique de son intervention.
 
3.4    Le médecin doit s’interdire, lorsqu’il diffuse des informations à destination du public, sur ses compétences et pratiques professionnelles, sur son parcours professionnel et ses modalités d’exercice, de le faire dans des conditions conduisant à ce que l’exercice de la médecine puisse être perçu comme une activité commerciale. Il doit se conformer aux dispositions de l’article R. 4127-19-1 et tenir compte des Recommandations émises en application de cet article par le Conseil national de l'Ordre des médecins.