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Réintégration anticipée des étudiants formés à l'étranger

Dernière mise à jour le Jeudi 17 juillet 2025 Temps de lecture : 4 mn
Réintégration anticipée des étudiants formés à l'étranger
Réintégration anticipée des étudiants formés à l'étranger : une fausse bonne idée
Le Ministre de la santé, M. Yannick Neuder, a rappelé, lors de la Conférence des Doyennes et Doyens de médecine (CDD) le 2 juillet 2025, puis aux Journées d’été de l’Association Nationale des Étudiants en Médecine de France (ANEMF), son projet d’autoriser la réintégration anticipée au sein des universités françaises, des étudiants en médecine effectuant leur cursus dans des universités européennes. 

La CDD, l’ANEMF, et le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) tiennent à marquer leur désapprobation à l’égard d’une mesure qui serait :
  • Injuste et inéquitable car les étudiants concernés étaient, soit en situation d’échec dans le processus d’accès aux études de médecine (PASS/LAS), soit voulaient se soustraire à ce parcours auquel sont soumis les autres étudiants. Cette modalité, dont on sait les coûts directs (frais d’inscription universitaires) et indirects (voyage, logement) très élevés, constitue un contournement que seuls les étudiants les plus fortunés peuvent se permettre.
  • Redondante et à nouveau injuste puisque cette possibilité réglementaire existe, d’ores et déjà, lors des épreuves du concours national en fin de sixième année de médecine (EN). Notons que le retour « anticipé » en quatrième année de médecine, proposé par le ministère, aboutirait à la réintégration d’étudiants de niveaux très variables voire insuffisants selon les universités d’origine, comme en attestent les résultats médiocres obtenus à l’EN de 2024 : 83 % d’échecs pour les étudiants issus d’universités européennes vs 3 % pour les étudiants faisant leur cursus en France. 
  • Inefficace et, là encore, injuste car l’admission de ces étudiants qui « contournent » les parcours classiques surchargerait brutalement nos universités et aurait indiscutablement une répercussion sur les places offertes aux étudiants ayant suivi leur cursus en France. En effet, la suppression du numerus apertus n’est pas une « baguette magique » pour augmenter mécaniquement nos capacités d’accueil et d’encadrement des étudiants déjà en saturation, sachant que près de 12 000 étudiants accéderont à l’internat en 2026. Dès lors, chaque place offerte à un étudiant dans le cadre d’un retour précoce se fera aux dépens d’une place offerte dans le cursus normal. Ainsi, les mesures proposées par le Ministre risquent, à terme, d’amplifier les tentatives du contournement de nos universités en diminuant le nombre de places disponibles en 2ème année de formation. Enfin, le retour de ces étudiants en 4ème année de médecine n’aura d’impact sur le nombre de professionnels en exercice que, au plus tôt, dans 7 ans (durées de l’externat plus de l’internat) ce qui ne résout en rien le problème de l’accès aux soins qui est un problème immédiat.
Les solutions urgentes pour améliorer l’accès aux soins sont ailleurs et une telle mesure ne fera qu’alimenter la dégradation des conditions de formation de nos étudiants. Il faut plutôt accompagner les solutions proposées par la CDD : assistants territoriaux, infirmiers/ères de pratique avancée dans le cadre d’un exercice coordonné par un médecin, stratégies raisonnées selon les spécialités à partir de besoins régionaux. Il faut intensifier la territorialisation des stages des étudiants en médecine de second et de troisième cycle.

Pour conclure, il est regrettable que sous prétexte d’une mesure prétendument « simplificatrice », le Ministère prenne le risque d’altérer la qualité de la formation médicale en surchargeant nos Facultés de Médecine avec une proposition injuste, inéquitable, et inefficace pour résoudre le problème des déserts médicaux. 

Communiqué commun du 16 juillet 2025 signé par :
  • Pr Isabelle Laffont, Présidente de la Conférence Nationale des Doyennes et Doyens des facultés de médecine.
  • Pr. Stéphane Oustric, Président du Conseil national de l’Ordre des médecins 
  • Marion Da Ros Poli, Présidente de l’Association Nationale des Étudiants en Médecine de France.