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Article 56 - Confraternité

Article 56 (article R.4127-56 du code de la santé publique)

Les médecins doivent entretenir entre eux des rapports de bonne confraternité.
Un médecin qui a un différend avec un confrère doit rechercher une conciliation, au besoin par l'intermédiaire du conseil départemental de l'ordre.
Les médecins se doivent assistance dans l'adversité.

1 - Confraternité

Si l'exercice de la médecine est pour le praticien éminemment personnel (articles 5, 69), le patient ne peut être toujours suivi, ni accompagné, ni traité par le médecin de façon individualiste. Le médecin est au regard de la médecine l'élément d'un corps qui le rend dépendant des autres membres auxquels le rattachent des liens indispensables, confraternels.

Ainsi le corps médical doit vivre dans la confraternité. Il est uni par un état d'esprit commun, celui d'une profession de responsabilité et d'action, par une formation intellectuelle particulière, alliant science et humanisme.

Il ne s'agit pas d'une manifestation de corporatisme mais d'une solidarité et d'une entraide nécessaires à l'accomplissement de la mission médicale. Les médecins ont besoin les uns des autres, en complémentarité, non seulement au chevet des patients, mais aussi dans le domaine de la prévention, dans l'accès aux avantages sociaux, dans la reconnaissance des droits de leurs patients. Les médecins doivent donc se connaître et savoir travailler ensemble, sans qu'une bonne entente entre eux ne devienne jamais une connivence au détriment du patient. L'expérience a montré que lorsque des différends existent entre les praticiens qui s'occupent d'un même patient, celui-ci risque d'en pâtir.

Il est de bonne pratique qu’au moment de son installation - ou d'une réinstallation - le médecin se présente à ses confrères voisins généralistes et spécialistes. Il lui est conseillé de nouer des relations avec les établissements de santé de la région. Les rencontres entre médecins, dans les réunions scientifiques, ordinales ou amicales, sont toujours bénéfiques.

Cette confraternité de principe se traduira par des attitudes, des comportements qui soient clairs, en particulier, vis-à-vis des patients ; lorsqu'un médecin croit découvrir une erreur commise par un confrère, la meilleure conduite consiste à entrer en rapport avec lui. Il en est de même en bien d'autres circonstances. Le patient ne doit jamais être ni l'objet ni même le témoin d'affrontements entre praticiens qui se disent confrères. Le médecin ne doit jamais médire d’un confrère dans l'exercice de sa profession, mais plutôt prendre sa défense s'il est injustement attaqué.

Malgré les difficultés qui atteignent un grand nombre de médecins, la dignité et la retenue restent aux yeux des patients des sources de considération, de confiance qui valent mieux que quelques blessures d'amour-propre.

Il est aussi attendu du médecin, qu’il soit, ou non, enseignant ou maître de stage, praticien hospitalier ou médecin remplacé, qu’il partage ses connaissances et son expérience avec les étudiants en médecine durant leur formation.

Cette relation de compagnonnage requiert de part et d’autre considération et respect.

2 - Différends et conciliation

Les origines des désaccords entre médecins sont multiples. Ils peuvent, du fait de leur importance, être portés devant les juridictions disciplinaires, voire civiles ou administratives. Compte tenu de l'implication de nombreux facteurs dans les situations litigieuses et de leurs intrications, il est souvent nécessaire, dans un souci de clarification, de recueillir les avis et conseils d'une personne tierce, expérimentée et capable de procéder à un réexamen de l'objet et des circonstances d'un désaccord.

Non seulement c'est une recommandation de bon sens, mais plus encore une obligation : le médecin doit rechercher une conciliation, il s'agit là d'une règle déontologique. Le médecin qui s'y soustrait peut se le voir reprocher par la juridiction disciplinaire. Les contrats passés entre médecins la prévoient d'ailleurs dans une clause spécifique (voir note [1]).

Le conseil départemental de l'Ordre constitue, par essence, l'intermédiaire privilégié entre les protagonistes d'un désaccord, le plus souvent par l'intermédiaire de son président, ou d'un membre choisi soit en raison de son expérience ou de sa spécialité, soit de sa notoriété, ou encore de deux membres choisis par les médecins concernés, selon la procédure prévue par le contrat.

La  mission dont ils sont chargés leur permet de rechercher une solution consensuelle qu'ils auront la charge de faire avaliser sous la forme d'un procès-verbal signé par chaque partie.

En cas d'échec, le procès-verbal de non-conciliation constituera un document important pour les suites tant disciplinaires que judiciaires éventuelles.

On ne saurait ainsi trop recommander aux praticiens de prendre un soin très particulier à l'étude des projets de contrats qu'ils signent, aux remarques des conseillers ordinaux chargés de leur examen lorsqu'ils leur ont été soumis. Rien ne vaut l'expérience de praticiens plus anciens et c'est, en l'occurrence, un bon exemple de confraternité.

3 – Entraide

Au-delà d'une obligation morale, l’assistance aux confrères dans l’adversité est aussi une obligation déontologique et confraternelle ; le terme adversité devant être entendu au sens large englobant les difficultés de santé, matérielles, morales, sociales et professionnelles.

Elle concerne tous les médecins quelle que soit leur forme d'exercice.

Alors qu'il est attendu beaucoup du médecin en termes de compétence et de disponibilité, les exigences qui pèsent sur son exercice sont de plus en plus lourdes. Le surmenage qui peut en résulter, une situation familiale délicate, un accident, une maladie plus ou moins grave, parfois occultée, sont autant de situations susceptibles de provoquer un isolement tant professionnel que social du médecin.

L'obligation d'assistance a toujours été présente dans tous les serments médicaux depuis l’origine. Le serment actuel mentionne aussi les familles dans l’adversité. Il est vrai que les médecins et leurs familles, en cas d’épreuve, comptent sur le soutien de la communauté médicale.

Parfois par manque de prévoyance, des médecins malades se retrouvent dans une situation financière difficile alors qu’il existe, pour les libéraux, par exemple, des assurances complémentaires permettant de couvrir le délai de carence des 90 jours de la CARMF. Les confrères hospitaliers ou salariés devraient se préoccuper de leur prévoyance.

Un grand nombre d’organismes contribuent désormais à assurer une entraide plus structurée. L’Ordre des médecins tout d’abord, comme l’y engage l'article L.4121-2 du code de la santé publique, exerce auprès de tous les médecins cette mission, au niveau départemental par l’intermédiaire d’une commission dédiée auprès de chaque conseil départemental à cette entraide. L’action départementale est relayée au niveau national par la Commission nationale. Pour les médecins libéraux, d’autres organismes interviennent également comme la CARMF par son fonds d’action sociale, l’AFEM (Aide aux Familles et Entraide Médicale), les organismes d’assurance et de prévoyance privée ainsi que de nombreuses associations d’écoute et d’assistance dans lesquelles l’Ordre et différentes organisations professionnelles participent activement.

Les situations nécessitant d’assurer une assistance à un confrère en difficulté ne manquent pas. Cette assistance peut être :

  • matérielle, qui se fait de plus en plus rare : aide financière ponctuelle, délais de paiement de frais professionnels…
  • professionnelle par des remplacements, par la tenue ponctuelle de cabinet, et l’aide organisationnelle ou administrative…
  • morale et psychologique : il s’agit désormais d’un volet essentiel de l’entraide individuelle. La profession doit être solidaire et le “confrère de proximité” est souvent le mieux à même de déceler les difficultés, d’apporter son réconfort et, s’il le juge utile, de prodiguer ses conseils. Les modes d’exercice en équipe qui se généralisent facilitent tant la veille que cette forme d’assistance.


Il est d’autre part avéré que l’efficacité de l’entraide dépend souvent de la précocité du dépistage des problèmes. Les conseils départementaux disposent certes de différents indices (signalements de patients, non prise de garde, absence de paiement de la cotisation…) mais là également le “confrère de proximité” doit jouer un rôle essentiel.

Tout médecin qui a connaissance des difficultés d’un confrère doit s’en ouvrir à lui, lui proposer son aide et le convaincre de se rapprocher du conseil départemental qui, de façon confidentielle, peut enclencher plusieurs niveaux d’aide et d’assistance.

Si ce processus n’aboutit pas et que la gravité de la situation qu’il lui appartient d’apprécier en conscience l’exige et sous réserve qu’il ne soit pas médicalement en charge du confrère, il doit aviser ce confrère qu’il informera le Président du conseil départemental. Celui-ci, dans la plus stricte confidentialité, prendra toutes dispositions utiles. Cette attitude, qui est déjà une obligation déontologique pour certains Ordres Européens de médecins, traduit le principe éthique de bienfaisance.

Enfin, en cas de décès du médecin, le conseil départemental apporte aide et conseil à la famille.


([1]) www.conseil-national.medecin.fr, rubrique « les modèles de contrats »